
Je suis en pleine lecture du superbe livre « Postvérité et autres énigmes » du professeur de philosophie Maurizio Ferraris. Le résumé du livre dit tout : « Combien de vérités y a-t-il dans la postvérité ? Même s’il est tentant de dire que les fake news ont toujours existé, que le mensonge est un ingrédient constitutif de la politique et de la vie et qu’il n’y a donc rien de nouveau sous le soleil ; même si l’on a envie de couper court en disant qu’il s’agit tout au plus de faire attention à ce que l’on lit comme on fait attention à ce que l’on mange et à ce que l’on boit, la postvérité est devenue un concept philosophique incontournable. Son émergence souligne une caractéristique essentielle du monde contemporain : l’alliance entre le pouvoir extraordinairement moderne d’internet et la plus ancienne des pulsions humaines, celle d’avoir raison à tout prix. » Jusqu’à maintenant, cette publication est probablement la plus importante de l’année pour moi. En voici un premier extrait :
S’obstiner à soutenir qu’il n’y rien de nouveau [à propos de la post-vérité] ne signifie pas seulement nier l’évidence, mais surtout ne pas vouloir tirer les conséquences évidentes du fait que la facilité avec laquelle on fabrique du faux acquiert une puissance toujours plus grande dans la mesure où elle vient après une longue vague de discrédit idéologique du vrai, considéré comme source d’oppression et de dogmatisme, auquel il fallait opposer, au nom de l’épanouissement de l’humain, la force des narrations et des vérités alternatives, quand il ne s’agissait pas de l’énorme et séduisante puissance du pseudos et du mythos opposés au logos aride et tyrannique.
Ferraris nous explique dans ce texte qu’il est important de considérer la post-vérité comme étant un phénomène radicalement différent des mensonges classiques, car celle-ci s’ancre directement dans la lignée des philosophes post-modernes du XXème siècle. Plusieurs d’entres eux étaient « sceptiques vis-à-vis de la vérité absolue ou des prétentions à des vérités universelles ». Tout ceci est accéléré par le phénomène de l’individualisme qui poussé à l’extrême propose l’atomisation de la vérité, c’est-à-dire que chaque individu a droit à sa propre vérité pour pouvoir se réaliser.
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