Je suis au deux tiers dans ma lecture du fascinant livre « Le déchaînement du monde – logique nouvelle de la violence » de l’historien des idées François Cusset. La thèse de Cusset est la suivante : « La violence n’y a pas reculé, comme le pensent certains. Elle a changé de formes, et de logique, moins visible, plus constante » et son livre décrit cet environnement. Je note, à la page 159, cet extrait à propos du monde numérique :

Tout est accessible instantanément, optimisé selon la circonstance, customisé pour que ce ne soit qu’à moi, au point de ne plus comprendre que ce ne soit pas là tout de suite, ou ne corresponde pas exactement à la demande expresse que j’ai faite – scandale.
En un petit paragraphe, Cusset résume l’influence principale de la culture numérique récente à la société post-moderne. Tout doit être désormais sur-mesure, tout doit être instantané. Tout est centré autour de l’individu. Et si un produit, service ou une sphère de la vie ne correspond pas à ces critères, elle engendre frustration, colère et peut-être même violence. Il n’y a pas de place pour le long terme, la réflexion. Il n’y a pas de place pour le projet de société puisque celle-ci brimera l’individu. Et cela explique bien la désuétude perçue de la politique et de la démocratie, qui se jouent dans le consensus et le long terme. Le dentifrice est sorti du tube, on ne peut plus le remettre. Il faut donc que la politique en tienne compte et s’adapte à cette nouvelle donne. Des mesures comme la proportionnelle ou les consultations citoyennes sont peut-être des pistes de solution qui rapprocheront l’individu du consensus sociétal.